Newsletter | Facebook

Les cahiers du regard

YC, Musée des Beaux Arts, Orléans, février 2005

Exposition de dessins d’Yves Carreau

La 2154e forme.

D’un siècle à l’autre
Le temps qui passe. Quelques remarques qui argumentent les faits du journal des jours, entre le chiffre et la forme. Tous les matins de tous les jours, qu‘importent les conditions, l’envie, le lieu, faire ce travail.
Habiter la forme, la dater puis fermer le cahier, faire la journée… Cela a commencé par un bilan en décembre 1990 : dans dix ans l’an 2000. De la révolte à la sagesse, être l’intercesseur entre le temps qui s’écoule et les jours qui s’accumulent. Épuiser le compte à rebours nous séparant du passage incontournable, un de plus pour l’histoire, un de moins pour la masse des jours qui m’est attribuée. Négocier sans gémir cette troublante ambivalence.
L’œuvre compensatoire du diariste appliqué : remplir méthodiquement les cahiers avec du temps, dans une vaine quête, donner corps, avec une jubilation comptable, à l’impalpable, retirer un jour, en ajouter un autre à la liste de ceux qui se succèdent. Les cahiers sont la chair de cette attente. Née du premier geste qui inaugure le jour nouveau, la forme ronde condense l’existence éphémère des jours, des mois, des années. Au début, la volonté puis le besoin me forcent à entreprendre, dans l’urgence du réveil, cet acte.
Une boule de plus. Distincte, elle s’incruste à la suite des autres dans un dispositif complexe, oublié dès l’achèvement de la page. Toujours différente, la forme lourde et lisse, rugueuse et légère, baroque ou minimaliste offre, journellement, sa permanente rondeur noire au blanc du papier.

Yves Carreau, novembre 1996

Avec son regard poétique, Claude Mouchard met les travaux en perspective dans le catalogue (voir espace Édition) : Serrures du temps


< 16/46 >