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ARCHIVES
DES IMPRESSIONS
MÉLANCOLIQUES
Yves Carreau


La Cage de l’Ombre Forte
publie le catalogue de l’exposition

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MÉLANCOLIQUES
Fragments d’une collection

YVES CARREAU

présentée par la grange du Boissieu
du 29 septembre au 28 octobre 2018
les samedis et dimanches
de 14h à 19h.

Vernissage de l’exposition
et présentation de l’ouvrage
le samedi 29 septembre à 15h

Tout au long de sa vie, Yves Carreau s’est passionné pour l’image sous toutes ses formes : du signe abstrait à la figuration, du noir et blanc à la couleur, de la miniature au grand format, de la pièce unique aux multiples.

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CLIQUEZ SUR LA PREMIÈRE IMAGE DU PANNEAU AFIN D’ENGAGER LE DIAPORAMA.
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Sélection de pages du catalogue reproduisant les œuvres exposées :
Linogravures, sérigraphies, xylogravures, dessins.

Contact : la grange du Boissieu
www.lagrangeduboissieu.fr
Alexandre Baumgartner (06 80 32 29 44)
Place Denis de Boissieu, Le Boissieu, 38530 La Buissière

Extrait

Lettre de Virginia Woolf à Lytton Strachey

Correspondance , éd. Le promeneur

52 Tavistock Square
10 décembre (1931)

« Je m’éveille d’un sommeil que tu peuplais(1) » - c’est la raison de ma lettre. Je sors juste d’un rêve où j’étais au théâtre, assise au parterre, tu étais de l’autre côté de l’allée dans une des premières rangées : tout d’un coup tu te retournais et me lançais un regard, et nous partions tous les deux dans un grand éclat de rire.
Quelle était cette pièce, pourquoi nous riions, je n’en ai pas la moindre idée, mais nous étions tous les deux très jeunes ( non pas tant, puisque tu avais ta barbe) et à l’âge auquel nous nous écrivions régulièrement. Pourquoi ces rêves ont-ils plus d’intensité que la vraie vie ?… Je ne sais, mais tant que l’impression de celui-ci persiste, je ne peux m’empêcher d’écrire à mon serpent barbu, d’autant que Clive me dit que tu vas partir plusieurs mois pour la Malaisie et qu’il y a peu de chances que nous nous revoyions avant que les tulipes soient en fleur à Gordon Square et que Waley(2) y joue au tennis avec Alix en pantalons de flanelle blanche.
Je suis allongée, paresseuse et satisfaite, et je dévore livre après livre. Que fais-tu ? Tu lis Shakespeare j’espère, et l’annotes fort soigneusement dans une très belle édition. À propos, j’ai lu
Comme il vous plaira l’autre jour et failli t’envoyer un télégramme pour te demander ce qu’il fallait penser de Jacques… Que faut-il comprendre ? Sa dernière réplique est bien curieuse.
Voilà toutes les nouvelles, puisque je ne vois personne, ni Ottoline, ni Charlie Chaplin(3)… personne sauf Clive qui fait irruption entre un déjeuner qui finit à 5 heures et un dîner qui commence à 8 heures 30, et continue à faire la fête jusqu’à l’heure où les moineaux s’envolent par bandes de l’
Embankment. Mon Dieu ! comme j’aimerais mener sa vie.
Ce n’est vraiment qu’une lettre sortie d’un songe : tu n’es nullement obligé de me répondre à moins que tu ne puisses me dire ce qui nous faisait rire ; mais lorsque le printemps t’aura ramené à Londres en même temps que les tulipes et les flanelles blanches de Waley, viens voir ta vieille et tendre amie,
Virginia

(Cette lettre n’a presque certainement jamais été lue par Lytton, qui était déjà gravement malade quand elle est arrivée à destination.)

1. I arise from dreams of thee : vers de la Sérénade indienne de Shelley.
2. Arthur Waley (1889-1966), orientaliste et sinologue réputé, auteur de nombreuses traductions. Conservateur au département des manuscrits orientaux du British Museum, il avait facilité à Strachey l’accès au journal de Greville.
3. En novembre, lors d’une première réception chez Lady Ottoline, au 10 Gower Street, Chaplin avait demandé à rencontrer le peintre Augustus John, ainsi que Lytton Strachey ; une seconde réception fut donnée où ils lui furent présentés.